Michel NOIRHOMME, né le 16 mai 1962, joyau mormontois (deux souliers d’Or Luxembourgeois successifs en 1988 et 1989 – huit fois nominé parmi les dix lauréats de ce prestigieux Trophée provincial – le Ballon de Cristal pour l’ensemble de sa carrière en 2012) reconverti en dirigeant.
A son sujet, on pouvait lire dans le livre à succès de Francis COLLIN « Le p’tit Collin ILLUSTRÉ » ces quelques lignes :
« Premier et double Soulier d’or provincial (en 1987-1988 et 1988-1989). Plébiscité Ballon de cristal par un jury de spécialistes quand l’Avenir organisa le 25e anniversaire du Soulier d’Or. Il a évolué en équipe première jusqu’à 41 ans. Sa carrière, il l’avait entamée à 11 ans, en cadets. Aujourd’hui, avec ses frères Guy et Jean-Marie, Michel joue un rôle de tout premier plan au comité.
Le seul ballon de cristal de la province voue donc une indéfectible fidélité à son club. Au terme de la saison 86-87, celle qu’il considère comme la plus aboutie, avec un titre de meilleur buteur en Promotion, le Mormontois fut courtisé par Robert Waseige et le FC Liégeois. Alors âgé de 24 ans, Michel repoussa l’offre, optant pour la sécurité sur le plan professionnel.
Durant toutes ses années comme patron du jeu mormontois, Michel aura côtoyé trois générations de joueurs. Celle de la grande époque promotionnaire avec les Péters, Devahive, Jonckeau, Périlleux, Bonmariage et ses frères ; celle ensuite des frères Lambert, Fagnoul, Jortay, Colette et enfin, celle des « gamins », Detroux, Collard ou Cédric Noirhomme, son neveu».
Rencontrons Michel qui a bien voulu me consentir cette rencontre, avec réserve car son humilité (trop) ne le pousse pas à se mettre à l’honneur, il préfère mettre l’accent sur le collectif pour justifier sa réussite sportive et prioriser son club du RRC Mormont que sur sa propre personne.
1. Quand as-tu débuté à jouer, et quel a été ton parcours ?
J’ai commencé en 1973 (à 11 ans) en cadets. A cette époque, contrairement à aujourd’hui, il n’y avait pas encore la catégorie minimes. Toutefois, je mens un peu en disant 11 ans car mon premier match, je l’ai joué à 8 ans avec les cadets à Rendeux où on (son frère Jean-Marie et les autres) lui avait dit de ne pas passer la moitié du terrain par peur que je ne sois hors-jeu donc je n’ai touché que 6 ballons sur le match.
Quant à ma première apparition en équipe première, elle coïncide avec mes 16 ans lors d’un match de P1 à Martelange (victoire 0-4 ou 0-5) où je me rappelle avoir livré un très bon match. Par la suite, j’ai alterné avec l’équipe junior et l’équipe première (titulaire ou réserviste) jusqu’à +/- mes 17 ans. C’est vraiment à partir de cet âge que j’ai été principalement un joueur de première tout en précisant qu’il m’est également arrivé d’aller jouer quelques fois avec l’équipe de réserve promotionnaire (Ndlr. série qui n’existe plus maintenant depuis de nombreuses années).
Et, j’ai terminé de jouer à presque 42 ans après un match à Bleid (je pense).
J’ai ainsi joué plus de 30 saisons dans le seul club de Mormont dans lequel j’ai tout vécu aussi bien des descentes que des montées et eu la chance de vivre l’âge d’or du club (1980 à 1990) durant lequel j’ai eu l’occasion d’affronter quelques grands noms du football belge (Courtrai (voir ci-dessous), Union Saint-Gilloise, Crossing de Schaerbeek, …).
2. Quel est ton meilleur souvenir en tant que joueur (ou quels sont-ils) ?
Le match qui me vient directement à l’esprit c’est lorsque nous avons reçu en coupe de Belgique (1985) Courtrai, après une victoire 0-2 à Herentals au tour précédent (2 buts de Fred Masy), club de D1 où jouait le gardien Vanderschommen (ex RWDM), Desnica (international yougoslave, sourd de naissance), Lemoine, Mariman, Quain et un certain Hein Vanhaezebrouck) devant pas loin de 3.000 spectateurs, et malgré la défaite 0-3 (déjà 0-2 après 10’), cela me reste un excellent souvenir.
- Le titre en P1 (saison 1980-1981) avec l’accès pour la première fois à la promotion où l’équipe restera neuf saisons durant (Ndlr. Jolie performance pour un club d’un aussi petit village), et certainement aussi tous nos autres titres de champions, assez nombreux, car Mormont a joué durant sa période un peu au « yoyo » entre la P1 et la promotion (séjour d’un an), jusqu’à même descendre en P2 en 1999 suivie de la remontée dès 2000 en P1.
- Les dix finales de la coupe de la Province (1981, 1982, 1983, 1986, 1987, 1988, 1992, 1995, 2008 et 2010) mais seulement deux gagnées en 82 à Bérismenil contre Champlon (7-1) (finale qu’il n’a pas jouée) et en 83 à Bastogne contre Florenville (3-0).
3. Peux-tu partager une anecdote intéressante ou amusante ?
Le lendemain du grand feu à Mormont, lors du coup d’envoi d’’un match à Pâturages (Promotion), feu André Bonmariage est toujours dos au jeu, et le temps qu’il se retourne, certainement parce qu’il est encore un peu « pompette », et boum c’est déjà goal. A la fin du match, râlant sec … alors que ses équipiers lui font la remarque « Allez Dylan, c’est bon, un point ce n’est pas si mauvais », il réagit étonné « un point !! », donc il n’avait même pas vu le goal égalisateur. C’est dire son état 😃
4. Tu as connu plusieurs entraineurs durant ta carrière, il y en a-t-il un que tu voudrais sortir du lot ou tous t’ont apporté à leur manière quelque chose ?
C’est vrai que j’ai connu beaucoup d’entraineurs, qui je dois dire m’ont tous apporté quelque chose (Jean-Paul Marique, Louis Andrien, Jean Leenaerts, Charly Alexandre, Christian Baratte, Auguste Coolen, Gustave André, Sandor Szijarto, mon frère Joseph, mon beau-frère Roger-Pierre Neuville (avec qui j’ai terminé), …). Maintenant, il faut aussi préciser que si j’en ai connu autant, c’est parce qu’à une époque, le comité décidait de changer d’entraineur chaque année, chaque fois à la fête à Mormont (rires) une décision qui pour être franc n’a pas toujours été couronnée de succès. (Ndlr. Aujourd’hui avec 10 saisons consécutives un certain Philippe Médery a vraiment aboli cette coutume/habitude).
Mais, pour en citer un, je dirais Jean-Paul Marique, qui n’est pas resté des années consécutives mais est sûr revenu 3 à 4 fois, la première fois (1981) c’était lui quand on est monté de la provinciale à la promotion avec notre premier match contre l’Union Saint-Gilloise ; saison durant laquelle on a joué devant 800 personnes de moyenne, il faut dire que le nord Luxembourg attendait depuis de nombreuses années qu’un club du nord monte en nationales, ce qui a engendré beaucoup d’entrées.
5. Quel coéquipier ou adversaire t’a le plus impressionné et pourquoi ?
En tant que partenaire, je dirais Frédéric Fagnoul et Daniel Devahive, mes deux pourvoyeurs.
En tant qu’adversaire, je dirais Jean-Louis Bonmariage « Jeda » (qui a aussi été mon équipier) qui n’était pas un tendre mais je pourrais également citer un certain Alfonso Fernandez que le Standard de Liège est allé chercher à Melen, et où il s’est imposé tout de suite.
6. A un moment de ta carrière, tu as été courtisé par Robert Waseige qui officiait au RFC Liège, et tu as refusé : quelles en ont été les raisons, et avec le recul, des regrets de ne pas avoir connu le monde professionnel ?
Je n’ai pas de regret, j’avais 24 ans et j’estimais que c’était déjà tard pour faire carrière, voir vivre de cela alors que je venais de trouver un boulot (comptable) à 5 km de la maison. J’ai préféré la sécurité parce que c’était loin d’être « sécure ». De plus à ce moment-là, on jouait en promotion, qui était quand même un niveau acceptable ; c’était déjà pas mal à cette époque-là de jouer en promotion, et personne ne dit que j’aurais joué.
Comment l’approche s’est déroulée avec le FC Liège ? Robert Waseige est venu me voir jouer une fois ou l’autre, puis je suis allé avec mon frère Joseph le rencontrer à Liège et même si je n’avais rien signé, c’était pratiquement fait. Puis le lendemain, en réfléchissant, et après avoir entendu à la radio l’officialisation de mon transfert à Liège, ce qui ne m’a pas trop plu car je n’avais rien signé, j’ai téléphoné pour dire que je n’y allais plus.
7. Quelles sont les différences les plus marquantes entre le football d'aujourd'hui et celui de ton époque ?
A mon époque, c’était plus facile car il n’y avait que le football comme sport, aujourd’hui le choix est beaucoup plus vaste d’où un engouement et une fidélité moindres. Les mentalités sont également différentes, bien qu’à Mormont on essaie de toujours de garder cette mentalité (à l’ancienne) qui fait un peu notre force. On va toujours privilégier un joueur qui a la mentalité « mormontoise » : convivialité, respect, bienveillance (se tirer vers le haut), solidarité, l’humain avant tout, plaisir sur et en dehors du terrain … Mormont c’est une grande famille où il fait bon vivre et où la fusion est totale entre toutes les composantes du club (joueurs, staff, comité, sympathisants).
8. Quelles sont, pour toi, les valeurs essentielles qu’un joueur de foot amateur devrait posséder ?
Comme déjà dit une bonne mentalité mais à mes yeux le respect est essentiel, respect de ses coéquipiers, du comité, de l’entraineur, de l’adversaire.
Maintenant, il faut aussi voir dans quelle division tu joues, il faut quand même certaines qualités footballistiques pour pouvoir y évoluer qualitativement.
9. Quel conseil donnerais-tu aux jeunes joueurs ?
Garder le respect envers tout le monde, jamais se foudre de l’adversaire ou d’un arbitre, toujours rester humble et bien évidemment travailler avec sérieux et la discipline requise.
10. Quel est ton point de vue sur l'évolution du football ?
Quand je vois encore la dernière décision de créer une nouvelle division 1 ACFF (Ndlr. Scission de la nationale 1 entre le nord et le sud ; bientôt plus de compétition foot entre flamands et wallons), cela va encore appauvrir la qualité de notre football. Il l’avait déjà été par la dernière réforme (2016-2017 – création de la D2 ACFF et la D3 ACFF) qui, en cascade, a appauvri la P1 provinciale et la D3 ACFF (anciennement promotion). Je ne dis pas que le football luxembourgeois ne s’améliore pas mais se retrouver chaque saison avec 6 ou 7 clubs luxembourgeois en D3 c’est peut-être un peu trop. Le temps où la série comptait 3, 4 clubs luxembourgeois la qualité du jeu était bien meilleure et les oppositions étaient bien plus fortes également.
J’estime également, je suis bien placé pour le savoir du fait que je tiens la comptabilité du club, que nous sommes « pompés » de tous les côtés, quand je vois les amendes qu’on a pour des couillonnades. Je me demande comment tous les clubs de D2 et de D3 ne s’allient pas pour contester, nous (Mormont aussi) sommes trop gentils.
11. Aujourd’hui, tu es dirigeant de club, quelle est la plus grosse difficulté dans la gestion d’un club ?
La plus grosse difficulté est pour moi le volet financier car depuis le covid, on a perdu en assistance générant une réelle diminution de la recette buvette (première source de revenus). C’est de plus en plus difficile pour tout le monde, on perd des sponsors, et les charges augmentent. Ce qui est embêtant, c’est parfois que tu n’as pas assez de rentrées pour faire face aux charges.
12. Ton club de cœur ?
- Au niveau international, j’aime bien City parce que De Bruyne y joue probablement et parce que je vois les matchs le samedi, j’aime bien l’AC Milan parce que mon fils est un supporter et j’aime bien aussi le Réal de Madrid.
- Au niveau belge, je n’ai jamais été un supporter d’un club en particulier mais j’aime bien l’Union (un peu comme tout le monde parce que c’est nouveau) et j’aime bien aussi Anderlecht. En général quand les clubs wallons gagnent, je suis plutôt un wallon qu’un flamand, j’aime bien. Par contre, sur la scène européenne, je supporte tout le monde.
- Au niveau amateur, je ne vais surprendre personne en disant Mormont 😃
13. Ton joueur de cœur ?
Pour l’actuel, je dirais Kevin De Bruyne (le De Bruyne en Angleterre) et Haaland (très fort : puissance, technique, mentalité), et pour l’ancien, je dirais Beckenbauer.
Quant à mon joueur régional, je vais rester fixer sur le Mormont d’aujourd’hui et d’hier en te disant Mehdi Lomma et Nicolas Prévot.
Pour en savoir encore un peu plus sur Michel, donnons également la parole à une personne qui le connait très bien :
- Son équipier, son entraineur, son ami Jean-Paul Marique :
Quand un jour d'été 1973 j'ai débarqué pour la première fois ( ... le destin !!) à « comment dites-vous, ... Laforge, ... Mormont !!?? », j'étais loin de me douter qu'un gamin d'une dizaine d'années qui se précipitait - à la mi-temps des rencontres jouées par ses grands-frères - dans le bourbier du « goal du fond », allait très vite déposer discrètement sa carte de visite et marquer, au-delà des buts, l'histoire du « encore alors » R.C.Mormont.
Dans ce minuscule village discret, perché là tout en haut, il y avait certainement eu un lâcher de ballons qui allait générer une épidémie de petits footeux. Des Bonmariage, Cornet, Lambert, Neuvillle, Noirhomme, Wynand ... (on aurait presque pu y ouvrir une maternité dédiée au sport), après avoir martyrisé les portes des granges avec leurs ballons, prenaient inévitablement le chemin de Laforge.
Et parmi eux ce petit jeune, Michel Noirhomme, sous la protection de ses grands-frères - talentueux eux aussi – et la sagesse de ses parents et de sa grande-sœur, allait tout naturellement s'épanouir dans la vallée. Depuis 50 ans maintenant il « foule » les installations de son club de cœur. Très vite il a rejoint toute cette jeunesse mormontoise pour s'illustrer sur le billard de Laforge. L'élan était donné, Michel allait y ajouter sa touche personnelle et très vite devenir le porte-drapeau de toute cette jeunesse sportive autour et alentours.
J'ai eu personnellement la chance de le côtoyer en tant qu'équipier, puis en tant qu'entraîneur, et enfin comme ami et sympathisant du club. Toujours la grande classe, le sérieux, le travail, le collectif, le partage, le respect, l'écoute et l'humilité ..., cela fait beaucoup tout cela, et pourtant. Des titres collectifs et individuels, toujours conquis sans se mettre en valeur personnellement. Fidèle parmi les fidèles, après sa très longue carrière footballistique, Michel s'est tout naturellement (pas facile cela...) mis au service de son club pour s'y engager encore davantage.
Sacré Michel, toujours aussi discrètement efficace, tout cela avec classe, intelligence, compétence ; actif sans relâche, derrière le comptoir lors de toutes les activités du club, soucieux et pointilleux face à tous les détails qui permettent à son club de garder le cap, ses valeurs de base aussi, ainsi qu'une qualité d'accueil jamais prise en défaut. Pas de folies dans son rôle partagé de gestionnaire, de la rigueur, du travail, le sens des détails, ... exceptionnel ! La crainte aussi pour l'avenir du club ...
Si j'étais encore son « coach » je lui dirais discrètement, « Michel, ... attention à ta santé, viens de temps en temps une mi-temps dans la tribune », et j'ajouterais « Merci pour tout ».
Un grand Monsieur, au sein d'un grand Club exemple de stabilité pour tous dans la verte province depuis 50 ans.
J'ajouterai une pensée particulière pour tous les autres qui s'activent d'une manière exemplaire au sein du maintenant R.R.C.Mormont. C'est magnifique.
Jean-Paul Marique
-->Petit retour sur notre 1ère newsletter consacré à notre ami Richard WIRARD.
Lorsqu’il nous faisait part dans ses anecdotes : « Lors d’un match à La Roche (2ème au classement) contre Athus (1er) (saison 73-74) à l’ancien terrain de Rompré (le long de l’Ourthe), Athus qui menait 0-1 n’arrêtait pas de dégager le ballon le plus loin possible dans l’eau, ce qui obligeait le préposé aux ballons à prendre le vélo pour aller le.s récupérer au barrage (éprouvette trop petite). Grâce à cette roublardise, par moment plus aucun ballon n’était disponible, Athus a gagné un nombre incalculable de minutes et a fini par maintenir le 0-1 (cette saison Athus a terminé champion) »
Voici ci-contre, pour ceux qui n’ont jamais connu ce terrain, une photo illustrant parfaitement les propos de Richard.